Extrait

Fermez vos yeux, Monsieur Pastor !

Extrait

Quinze ans à peine
Je rends de l’écume par la bouche
Couleuvre allongée sur le tapis du salon
En jus je me répands sur les arabesques du tapis
Un filet de bave s’introduit dans mes narines renversées
Ma tête regarde le plafond
Mes yeux s’éveillent
Je vois le plafond
Je sens mon sexe bandé dans la tiédeur de mon slip humide
Je renverse ma joue sur le tapis
Ma tête lourde
Un liquide chaud collé collant
Je touche la peau maculée de la joue
Sang séché J’ai saigné
Je saigne encore
Enfoncé dans le tapis
Je m’alourdis de plus en plus
Je me répands
Je me vide
Je reprends forme humaine
Couleuvre rampante je deviens
Sous la table du salon je fais une halte
Photo de couverture du magazine posée sur le plateau vitré de la table du salon
Je croise le sourire aguicheur de Patrick Bruel
Patrick mal rasé sourire papier glacé surprend mon intimité
J’accroche ma main droite au pied du bahut pour me hisser loin de cette présence dérangeante
J’introduis ma main dans mon slip pour en savoir un peu plus sur mon jus répandu
Le coton du slip n’est pas collé au méat
La sécrétion était de l’urine
Le temps s’est dilaté
J’enfonce ma main dans le bahut pour me hisser à la hauteur des arabesques où je replonge ma tête
Bave et sang séchés
Je rampe
J’essaie de trouver la faille
Les arabesques se sont soudées entre elles
Le givre m’a emprisonné sous le tapis
Je perçois un son
C’est la voisine sur le palier
Où est le couloir
La porte d’entrée
Je m’agite
Je rampe
Couleuvre prise au piège
Je traverse le lino du couloir
Je déchire la porte
J’ouvre la voisine
Elle me demande
Gilles ça va

Je ne sais pas si ça va
Je suis fatigué épuisé vidé
Voie lactée
J’ai des sécrétions
J’ai des érections
La mort se moque de moi
Chaque crise me vole une mort
Une mort possible
Ma mort s’émiette en crises successives
En réveils douloureux